Pour ou contre Halloween ? Retour sur les fêtes annuelles

Publié le par ACEMS

Compte rendu du « Café Horloge » du 8 novembre 2011


Pour ou contre Halloween ?

 

Fêtes traditionnelles, societales ou commerciales ? d’Halloween a Noel et Pâques, de Saint Valentin aux fetes du travail ou de la musique, retrouver le sens et le mystère des grandes fêtes populaires annuelles

 

 

Comme chaque deuxième mardi de chaque mois, le Café-Horloge a ouvert ses portes aux cherchants de tous bords le 8 novembre dernier,  au café-bar L’R DE RIEN, sur le thème « Pour ou contre Halloween ? ».

Comme le rappelle le premier intervenant, si cette fête est bien évidemment très ancrée dans la tradition américaine, elle l'a hérité des colons irlandais qui l'y ont introduite. Car Halloween est d'abord une grande fête d'origine celtique et tire ses racines symboliques de l’ancienne fête de Samhain, autrement dit le nouvel an celte, un moment de passage entre deux vies (d'où son association à la mort, moment lui-même de passage). Au gré de la discussion, il est évoqué la nature pouvant paraître paradoxale de cette fête : à la fois évocation de la mort et de la lumière, des angoisses du passage et de la vie. Il y a là une réminiscence du grand dieu celte de lumière Bélénos, l'Apollon de Celtie et divinité de cette célébration, dont l'une des formes, Belenos Ankavos - Belenos en tant que dieu de la mort - donnera l'ankou des légendes (la mort dans la tradition bretonne ; en rappelant au passage, que la racine indo-européenne -nk, dont ce terme est issu, désignait une forme de goulot, de passage resserré et étroit, et a  donné des mots appropriés en l'occurrence comme "angoisse"). 

Mais Halloween est aussi la fête de la joie (et comment ne pas se plaire à voir dans le suffixe "ween" une sorte de réminiscence - fut-elle empruntée à la langue des oiseaux - de la rune de la joie, wyn). C’est l’occasion d’exorciser la mort en ramenant les sabbats de sorcières et les danses macabres à une sorte de ronde dérisoire parodiée par des enfants. A l’entrée des mois les plus sombres de l’année, Halloween appelle ainsi à la joie, à l’allumage de l’étoile intérieure à la citrouille, et au-delà aux offrandes et aux cadeaux qui ont toujours été la marque de cette fête à forte connotation caritative (même si, aujourd'hui, les quêtes généreuses de jadis ont été remplacées par des quêtes plus profanes et ludiques ; mais aider les enfants à traverser par la joie ce moment difficile d'obscurité n'est pas vain). Il fut rappelé notamment que l’UNICEF fut créé à l'occasion d'une quête d'Halloween pour les enfants nécessiteux suite à la guerre (1946 ; l'organisme fut consacré officiellement par l'ONU dans la foulée), et la quête d'Halloween de l'UNICEF resta longtemps une des grandes actions annuelles de l'ONG.

Un autre intervenant considère que, selon lui, la fête d’Halloween était par bien des aspects une dégénérescence de la fête de Samain. Celle-ci célébrait anciennement le début de l’hiver celtique et l’on y fêtait  la classe des guerriers. C’était aussi, très logiquement, la fête d’intronisation du roi, de même que la Saint Jean d’Hiver devrait marquer chez les Francs-maçons l’intronisation du Vénérable maître et de son collège d’officiers, en lieu et place de la date administrative liée à la rentrée scolaire, grave contresens énergétique.

Lors de la nuit de Samain, le temps est comme suspendu entre la nuit qui semble s’étendre sur le monde et le jour qui tarde à pointer : on n’est déjà plus dans l’ancien qui se décompose, mais pas encore dans le nouveau qui n’est pas formé. Ainsi en est-il aussi à l’intérieur de nous-mêmes, où l’alternance d’ombre et de lumière est mise en évidence par le cycle des crises, sublimé dans le théâtre rituel du temps sacré.

Il déplore donc que la fête moderne d’Halloween ait occulté cette symbolique en privilégiant les forces de l’ombre au détriment de la lumière secrète, et surtout en en faisant ressortir les aspects les plus théâtraux, les plus spectaculaires et aujourd’hui les plus commerciaux.

La parole circule ensuite entre les participants qui reviennent sur ce thème de l’alternance de l’ombre et de la lumière. A la question de savoir ce qui différencie la fête de Samain, ancêtre d’Halloween, de la traditionnelle Saint Jean d’hiver des Francs-maçons, il est répondu que là réside toute la différence entre la mort et la renaissance. Avec la Fête de Samain, on entre dans la nuit de la terre, dans le signe du Scorpion dont on a pu dire que c’était le soleil de la nuit, par opposition au signe du Lion qui est le soleil du jour. Le Scorpion est marqué par toute la dynamique alchimique de la putréfaction, nécessaire à la renaissance et à l’ascension qui commencera potentiellement dans le Sagittaire (la flèche du centaure) et réellement dans le signe du Capricorne. La fête de Samain nous introduit dans ce monde intermédiaire entre mort et renaissance, dans ces jours épagomènes que les anciens égyptiens ajoutaient aux 36 décans de leur calendrier officiel pour former l’année astronomique juste et parfaite de 365 jours un quart. En ces jours particuliers où chacun sent que tout bascule, mais ignore si ce sera vers l’être ou vers le néant, les statues des dieux étaient sorties de la pénombre des Naos pour être portées  sur le toit des temples, afin d’être irradiées par la lumière nouvelle. A la Saint Jean d’hiver, la mort est déjà derrière nous, le temps est venu de redresser le pilier osiriaque, de renouveler et de régénérer les fonctions de créations. Pour un autre intervenant, Samhain et Saint-Jean d'hiver sont tout simplement l'entrée et la sortie d'une période sombre et initiatique, ponctuée de fêtes de lumière (Guy Fawkes'night, Saint-Martin d'hiver, Sainte Barbe, Sainte Lucie...), qui correspondent aux "mois noirs" de Bretagne, avant de rentrer dans les 12 jours symboliques de Jul (entre Saint-Jean et la nuit des rois, la 12e nuit/12th night de Shakespeare)

Mais pour cheminer dans le monde des morts du 1er novembre au 21 décembre, il faut être porteur d’une lumière que rien ne peut éteindre, ce feu secret ranimé par le brandon tiré de sous le boisseau,  qui permettra de faire renaître le foyer de la Saint Jean d’hiver. Ce feu secret repose dans le cœur de chacun, c’est notre capacité à faire offrande et à donner sans esprit de retour, c’est notre foi en la vie qui se perpétue au-delà des cycles de morts et de naissances. Tel est le sens des cadeaux, des gestes caritatifs qui sont le trait commun entre Halloween et Noël. L’amour, le don, c’est donc ce pont de lumière qui fait passer d’une rive à l’autre, du commencement de la fin à la fin du commencement.

 

Yann

 

Publié dans Cafés-Horloge

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